Fabrice Amadeo: Mon combat
Je suis encore au chaud pour 24 heures dans l’anticyclone de Sainte-Hélène. Dernier bouclier protecteur avant la première dépression australe et le grand toboggan des mers du Sud. Et ce matin, j’ai peur. Ce n’est pas le trac de l’artiste avant de monter sur scène ou l’excitation du sportif avant la bagarre. C’est une peur profonde et animale. Toutes ces portes météo qui se sont fermées devant moi depuis trois semaines, la chance qui ne tourne toujours pas : mais que l’océan me réserve-t-il dans le Sud ?
L’accident de Kevin. Les chocs avec des OFNI, ou avec du matériel de pêche pour Jérémie, Alex, Sébastien et Samantha. Nous sommes les témoins des conséquences de notre capitalisme ravageur et du péril de notre planète. Il y a de plus en plus de choses qui traînent dans l’eau et nous menacent. Et puis il y a ces OFNI que l’on ne nomme pas pour des raisons d’image : les cétacés. Ils adorent cette zone de rencontre du courant chaud des Aiguilles et du courant froid de l’Antarctique riche en plancton, sous l’Afrique du Sud. Nos bateaux lancés à pleine vitesse sont un danger pour eux. Ils sont une menace pour nous.
De la terre, nous sommes vus un peu comme des héros des temps modernes. Pourtant nous ne sommes que des gens normaux avec nos peurs, nos angoisses, nos doutes et nos larmes. Des gens normaux habités par une passion extra-ordinaire. C’est au nom de cette passion et de cet amour pour l’océan que je poursuis ma route aujourd’hui. Et je me bats avec mes moyens d’homme normal pour conjurer mes angoisses et mes doutes.
Fabrice
Newrest – Art & Fenêtres